dimanche 1 mars 2015

"Nos seuls remparts contre la mort sont la culture, c'est-à-dire la mémoire, et l'art"


"Un écrivain n'a pas de réponse politique à opposer à cette implacable
usure du temps ; en revanche, il en a une, singulière, qui lui est fournie
par son art, et Byron donne l'exemple de ce que pourrait être cette
réponse, quand aux cités détruites, aux débris mutilés, à la puissance
évanouie, il oppose la lettre de Servius Sulpcius, "sa page toujours
vivante" (his yet surviving page), où est conservée la leçon morale d'un
pareil pèlerinage. Nos seuls remparts contre la mort sont la culture,
c'est-à-dire la mémoire, et l'art, qui est la feuille où, tel un
entomologiste qui garde aux ailes fugitives des papillons leurs couleurs
diaprées, nous fixons nos amours mortes et nos illusions abolies. [...] La
fonction de l'écriture est une fonction résurrectionnelle, pascale. [...]
Oui, nos mots, nos pauvres mots, sont pareils à ces cierges qui brûlent
dans la nuit de Pâques où les tombeaux s'ouvrent et où la mort est
vaincue".

Gabriel Matzneff, La Diététique de Lord Byron, éd. Folio, 1984, p. 86-88.

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