mardi 14 février 2012

"Moi, prude Limousin, j’ai fait de toi ma muse"

 L'émission de France Inter, la Marche de l'histoire que j'écoute en buvant mon café,
privilège de rentier, portait aujourd'hui sur les troubadours.
http://www.franceinter.fr/emission-la-marche-de-l-histoire-la-civilisation-des-troubadours
L'invité Luc de Goustine
http://fr.wikipedia.org/wiki/Luc_de_Goustine
http://www.ventadour.net/
était quelqu'un qui n'est pas "né au pays". Normal ! à Toulouse, c'est une Bretonne qui
a donné sa voix pour les messages en occitan dans le métro. Et je constate chaque été, que les plus dynamiques pour lutter contre la mort de l'occitan sont justement les "rapportés".
Contrairement à l'invité, je suis sûr que le limousin va disparaître, au moins comme langue parlée. Resteront quelques personnes parlant une langue universitaire, l'occitan.
Quand je donne à lire des textes écrits en graphie "officielle" occitane à des cousins, voisins parlant le "patois limousin" ils n'arrivent pas à le lire.
C'est triste. On pleure sur la disparition de langues à des milliers de km, mais on se moque bien de l'occitan qui fut parlé sous diverses variantes par presque tout le monde il y a 100 ans en Occitanie.
Dans les commentaires du site de l'émission j'ai trouvé ce beau texte qui semble être de Anne-Claude Lumet

Vole aux vents troubadour
Pour que vole Aliénor
Moi, prude Limousin, j’ai fait de toi ma muse.
Je n’étais qu’un trouvère, un homme qui t’amuse.
Tes yeux nous troublaient, nous, poètes de Poitiers
Tu régalais nos vers, desséchais nos gosiers,
Faisais couler notre encre et le sel de nos larmes.
Mais j’ai su résister à l’ardeur de tes charmes.
Ô ma source de vie et mon fleuve d’amour !
J’étais ton Ventadour, ton humble troubadour.
Avec Louis ton époux, tu partis en croisades
Et brûlas tous les cœurs, ce fut la débandade !
Ton Louis fut humilié, ses cornes à porter
Trop lourdes pour un Roi, les firent t’enlever.
Loin à Jérusalem te conduisit de force
Tu te révoltas donc et ce fut le divorce.
Vous fîtes lit à part et bateau séparé,
Un retour sans retour pour couple déparé.
Henri Plantagenêt te nomma souveraine
De la cour d’Angleterre et je suivis ma Reine
Au Royaume rosbif. Je devenais chétif,
Délaissé par ma belle à l’amour exclusif
Pour ce Plantagenêt, cet Henri Deux l’angliche
À qui tu dévoilais le trésor de tes miches.
Tu donnas huit enfants à ton guerrier mari,
À ton amour volage, à ton beau Roi Henri :
Un Richard Cœur de Lion, ainsi qu’un Jean sans Terre,
Bientôt célèbres Rois qui trahiront leur père
Pour les yeux de leur mère. Elle, mon Aliénor
Qu’Henri délaissera sans peur et sans remord
Pour un lit encor frais, celui de Rosemonde.
Tu fuiras ton Anglais, cet ingrat, cet immonde
Pour revenir vers nous en pays poitevin.
Au retour de la belle, on fit couler le vin,
On déclama nos vers, pour les yeux de ma Reine.
Éphémère bonheur, rien n’apaisait ta haine
Envers le vil Henri. Il te fit enlever
Pour t’emmener chez lui, du monde t’arracher
Si loin, à Winchester dans cette abbaye triste.
Recluse à l’étranger, nous perdîmes ta piste.
Oubliée Aliénor jusqu’au jour de la mort
D’Henri ton ravisseur qui délia ton sort.
Tu revins parmi nous pendant dix années
Puis tu t’enfuis du monde et demeuras cachée
Dans une autre abbaye au cœur de Fontevraud.
Ton âme s’envola, quitta le lourd fardeau
Des ans et de ta vie une nuit hivernale.
Souffle encor aujourd’hui ton haleine royale
Tu nous vois orphelins, nos mots sont avachis
La rime se débine et le sens est hachis
Parodié, pleurs geignards, repoussante purée
Plastifiée, indigeste, une horreur gratinée.
Bien à toi, ton Bernard, ton poète Ventadour
Ton vierge Limousin, ton pauvre troubadour.

Anne-Claude Lumet ,

1 commentaire:

JoëlP a dit…

Ma petite fille apprenait l'occitan en maternelle... Elle adorait ça... Dommage, elle a dû changer d'école.

 
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